Dimanche 2 juillet 1944 : les Allemands attaquent

Je pars avec Paulo [Jean GOLICK], mais au bout de 50 mètres, celui-ci pense à un F.M. resté dans une voiture et il revient le chercher. Il prend l'arme, me donne quelques chargeurs et nous voilà repartis. Nous sommes les derniers à quitter le village. Il reste la Dizaine d'Yvon [Yves LAMOURDEDIEU] qui, par un fol héroïsme, couvrit notre retraite et quelques hommes qui, se trouvant dans la cuisine, ne se sont pas rendu compte de notre départ et quitteront le village in extremis.

Seuls restent donc sur place en plus de la Dizaine de sécurité quelques éléments de la Trentaine qui n’ont pas entendu les ordres ou qui entreprennent la destruction des documents utiles à l’ennemi et, bien sûr, quelques habitants rapidement dans le champ de mire de l’ennemi. La colonne allemande s’est arrêtée sur la route I.C. 127, en contrebas du hameau.

Nous voilà repartis

Un officier m’a ordonné de descendre

Prix coûtant

Campagne de Crimée

Le 2 juillet 1944 vers 6h30, mon attention fut attirée par un bruit de moteur provenant de la route. Un instant après, je me suis entendu interpellé du dehors. Je suis sorti et ai vu plusieurs voitures allemandes sur la route. Dans l’une d’elles, un officier m’a ordonné de descendre     . Il m’a demandé où étaient cachés les hommes du maquis. Sur ma réponse négative, il m’a renvoyé.

Rémy RICHARD

(Dick)

22-10-1922

© SHD GR-16P-509822

Maurice MARCHADIER

né en 1900, cultivateur

L'histoire du maquis du "Petit Parry",

in La Trentaine d'Issoire

AD63 - Rapport 1333 (cote 908W135)

Bien vite, l’ennemi investit les lieux. Les maisons sont fouillées.

Quelques minutes plus tard, ce même officier est venu perquisitionner chez moi … À partir de ce moment, ma maison a été visitée plusieurs fois. J’ai remarqué sur la poitrine de l’un d’eux un insigne ovale en bronze portant l’inscription “1941-42” autour d’un dessin … Lui ayant demandé ce que cela signifiait, il m’a répondu :

Lors de l’attaque du village par les troupes allemandes le 2 juillet 1944, j’étais seule à la maison. Un officier suivi de soldats est venu perquisitionner et a emporté du ravitaille-ment et du tabac ; le tout m’a été payé au prix coûtant.

AD63 - Rapport 1333 (cote 908W135)

AD63 - Rapport 1333 (cote 908W135)

Maurice MARCHADIER

né en 1900, cultivateur

Marie FAURE

née en 1882, cultivatrice

« Campagne de Crimée »

et le dessin une unité de tanks.

Pendant ce temps-là,

Nous nous dirigeons vers la gorge indiquée. Au bas de la pente, près du ruisseau nous rattrapons les capitaines CHAUVEAU et ÉLOY, et les deux prisonniers. CHAUVEAU nous dit :

« Ils sont tous partis, (c'était son ordre et son exemple) rattrapez ceux qui sont dans la gorge et dites leur de s'arrêter et de m'attendre. »

Paulo et moi nous continuons et nous transmettons l'ordre à ceux que nous rencontrons. Les uns continuent plus vite que jamais, d'autres s'arrêtent avec nous près du ruisseau où nous nous reposons en atten-dant le capitaine. À ce moment quelques rafales se font entendre sur le sommet, en direction du village que nous venons de quitter !

Quelques rafales se font entendre

Rémy RICHARD

(Dick)

22-10-1922

© SHD GR-16P-509822

L'histoire du maquis du "Petit Parry",

in La Trentaine d'Issoire

Alors que nous étions postés dans un chemin creux aux abords du village       , nous enten-dîmes une rafale de mitrailleuse. Notre chef décide aussitôt de nous replier plus loin        . Nous avions à peine commencé notre repli que des voitures de combat munies de mitrailleuses étaient sur nous, nous arrosant de leurs rafales (1).

THÉVENIN, TIXIER et PATURET réussirent à se sauver.

L'histoire du maquis du "Petit Parry",

in La Trentaine d'Issoire

AD63 - Rapport 1333 (cote 908W135)

Rafale de mitrailleuse

André GRANET

(Dédou)

19-10-1924

© AD63, 2546-W-6329

(1) : Il s'agit très certainement d'automi-trailleuses Panhard 178 confisquées par l'armée allemande.

© Panzerspahwagen 204(f) (AMD Panhard 174/178) in Matériels terrestres 39/45

Yves LAMOURDEDIEU et ses six compagnons sont maintenant postés sur le talus qui surplombe le chemin en bordure du champ de seigle       , à quelques 200m de leur position initiale. C'est alors qu'arrive en courant José CLÉMENTE (Buffalo).

Alors que la Dizaine de sécurité amorce un repli stratégique depuis sa position initiale          d'où elle surplombait l'unique voie du village, elle est la cible de tir. Edgard PATURET (Larpette) est blessé de 4 balles de fusil-mitrailleur qui, rentrant par la main, lui fracturent les os de la main gauche et le cubitus pour ressortir plus haut par l’avant-bras. Ne pouvant plus se servir de son fusil-mitrailleur, il lance trois grenades et profite de la confusion générale pour s’enfuir accompagné de Roger THÉVENIN (Croquignol) et de Jean-Marc TIXIER (Marco), lui-même cible de balles qui n’ont heureusement traversé que sa veste. Selon Roger THÉVENIN, c'est Yves LAMOURDEDIEU qui leur ordonne de partir (« Il [Yvon] nous a donné l'ordre de décrocher. », Déclaration en vue du 50ème anniversaire, 10-04-1994 in La Trentaine d'Issoire) sans que l'on sache si c'est avant ou après que PATURET ne soit blessé.

Abattu par la douleur, Edgard PATURET s’arrêtera sous le pont de l’I.C. 27 en bas de la gorge du ruisseau de Roche-Charles où il restera caché pendant trois jours.

Différentes séquences de l'attaque du Petit-Parry :

         : Un officier allemand ordonne à Maurice MARCHADIER de descendre du village pour

           l'interroger avant d'ordonner la fouille des maisons.

         : La  Dizaine  de  sécurité  d'Yves LAMOURDEDIEU  se poste  à la  sortie du village,  en

           surplomb de l'unique voie de circulation.

 

         : Cible de tir, la Dizaine se replie à 200m de là, sur le talus en bordure du champ de

           seigle.

Mais n'a-t-on rien laissé de compromettant dans les maisons : qu'est-il en particulier advenu des archives du groupe ?

L’énigme des documents de la Trentaine d’Issoire

Le combat continue brièvement. Claude MARRET est blessé puis c’est le tour de Paul DALLANT en lui portant secours. Herbert A. CAMPBELL, qui harcelait l’ennemi de sa mitraillette, est à son tour gravement blessé au cou. De son coté, Yves LAMOURDEDIEU est blessé deux fois.

De nouvelles rafales crépitent encore

Nous reprenons nos armes mais nous ne voyons rien et le capitaine ne nous rejoint toujours pas. Je conseille d'emprunter une ravine perpendiculaire à la gorge et de remonter sur l'autre versant d'où nous verrons peut être quelque chose. Paulo et moi nous partons.

Quelques-uns de nos camarades nous suivent (Le Rusé, Fouet). Nous avons un F.M. et 4 boîtes chargeurs soit 100 cartouches qui représentent à peu près une minute de tir, 3 mitraillettes, 2 fusils, 2 ou 3 pistolets et quelques grenades. Nous gravissons la pente abrupte dans le lit d'un ruisselet dont le fond boueux colle à nos semelles. Pendant que nous grimpons, de nouvelles rafales crépitent encore et quand nous atteignons le sommet, nous nous installons et essayons vainement de voir quelque chose à l'aide de nos jumelles.

Rémy RICHARD

(Dick)

22-10-1922

© SHD GR-16P-509822

Le combat est maintenant terminé. On a vu précédemment ("Les prémices de l’attaque") que François KOPRIVA (Ortie), arrêté la veille près de Condat, était retenu prisonnier dans un véhicule de la colonne allemande lors de l’attaque du Petit-Parry.

Paul DALLANT, Claude MARRET et Herbert CAMPBELL furent mortellement blessés.

Avec LAMOURDEDIEU, blessé, Chris et PAGURA, nous avons été faits prisonniers. On nous aligna le long d’un talus pour être fusillés, mais un officier renvoya le peloton d’exécution un moment plus tard.

Nous sommes restés sur place jusqu’à midi environ. On nous emmena ensuite dans le village où LAMOURDEDIEU fut sommairement pansé.

Peloton d’exécution

André GRANET

(Dédou)

19-10-1924

© AD63, 2546-W-6329

AD63 - Rapport 1333 (cote 908W135)

François KOPRIVA

(Ortie)

11-07-1915

Lorsque le feu a cessé, j’ai entendu crier dans un champ de blé. Les Allemands ont invité les maquisards à se rendre. Quatre ou cinq jeunes gens se sont rendus.

J'ai entendu crier dans un champ de blé

AD63 - Rapport 1333 (cote 908W135)

Rémy RICHARD souligne là un point important. Une deuxième colonne allemande devait prendre à revers le Petit-Parry pour couper la fuite des maquisards. Pour une raison inconnue, cette colonne a accusé un important retard et n'est arrivée sur place que vers 11h30, donc bien après la fin des combats. Franck GIRON, employé chez Mme CHAMPEIX (cultivatrice au Roquet, commune de La Meyrand) le confirme :

Le combat est maintenant terminé. Le bilan est le suivant :

  • Ont pu s'échapper après en avoir reçu l'ordre : Edgard PATURET (Larpette), blessé, Roger THÉVENIN (Croquignol) et Jean-Marc TIXIER (Marco).

  • Ont été faits prisonniers : Garnet P. COLUMBUS (Chris), André GRANET (Dédou), François PAGURA (Pierrot) et Yves LAMOURDEDIEU (Yvon), blessé.

  • Ont été mortellement blessés : Herbert A. CAMPBELL (Herbie), Paul DALLANT et Claude MARRET (Paul).

Mais que signifie "mortellement blessés" ? Sont-ils morts ou seulement blessés ? Y a-t-il eu crimes de guerre ?

L'histoire du maquis du "Petit Parry",

in La Trentaine d'Issoire

Maintenant, tout paraît calme

Rémy RICHARD

(Dick)

22-10-1922

© SHD GR-16P-509822

Mais maintenant, tout paraît calme. Nous attendons encore de longues minutes, mais comme plus rien ne s'entend ni ne vient, ni ami, ni ennemi, nous descendons de l'autre côté dans la vallée de la Couze où le bois s'arrête laissant deux à trois cents mètres de terrain découvert que coupent le chemin I.C. 36 et la Couze.

Après quelques hésitations, nous traversons ce découvert et avons la chance de passer et de nous cacher dans le bois en face quelques secondes seulement avant l'arrivée d'un convoi allemand qui, à Val Beleix, empruntera le chemin I.C. 27 et prendra le Petit Parry à revers. Seul le manque de synchronisation des deux mouvements fit manquer leur but aux colonnes allemandes et permit à beaucoup d'entre nous de s'en tirer.

Le 2 juillet 1944, vers 11h30, alors que je gardais les bêtes de Mme CHAMPEIX dans un pacage qu’elle possède en bordure de l’I.C. 127, j’ai aperçu une colon-ne allemande qui venait de la direction de Valbeleix. Un gradé m’a interpellé et m’a demandé où étaient cachés les maquis.

Franck GIRON

né en 1898, employé

AD63 - Rapport 1333 (cote 908W135)

Colonne allemande

6. Après l'attaque

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